Le projet de traité de l’OMI

Greenpeace, Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), Basel Action Network, European Federation for Transport and Environment, Ban Asbestos Network, Bangladesh Environmental Law Association, Bellona, Young Power in Social Action of Bangladesh, Corporate Desk of India, Ban Asbestos Network of India

Une coalition d’ONG de défense des travailleurs, des droits de l’Homme et de l’environnement a dénoncé le résultat de la réunion de l’Organisation maritime internationale (OMI) organisée cette semaine, qu’elle considère immoral. Cette réunion avait pour objectif de développer le droit international permettant de contrôler les pratiques globales de démantèlement des bateaux qui exploitent les travailleurs et l’environnement des pays en développement.

Le projet de traité n’exige pas que l’industrie du transport maritime nettoie au préalable les bateaux en retirant les matériaux toxiques avant de les exporter vers des pays tels que l’Inde, le Bangladesh, ou le Pakistan. Il n’exige pas non plus de l’industrie qu’elle prenne en charge les frais nécessaires pour nettoyer la pollution passée, améliorer la situation actuelle et garantir le développement de capacités de démantèlement "vertes" à l’avenir. Le principe du pollueur-payeur, pourtant communément accepté, n’est pas appliqué dans le projet de texte. A la place, les pays où à lieu le démantèlement des bateaux seraient tenus d’en supporter le coût pour l’industrie toute entière.

"Le projet de convention est dénué de tout principe " a déclaré Ingvild Jenssen, la coordinatrice de la plate-forme. "D’abord, il avalise la pratique, condamnée universellement, qui consiste à se débarrasser de ses déchets toxiques dans les pays pauvres - ce qui est déjà immoral. Et pour comble, il permet aux exportateurs de déchets de ne pas payer pour les dommages causés."

La réunion a été dominée par les intérêts de l’industrie de transport maritime et les principales puissances maritimes - Norvège, Etats-Unis, Allemagne, Japon, et Grèce. Dans le même temps, les intérêts des autres parties prenantes, dont l’Organisation internationale du travail, les syndicats, la Convention de Bâle des Nations unies, les travailleurs des chantiers de démantèlement, les recycleurs verts, et les organisations de défense des droits de l’Homme et de l’environnement ont été ignorés ou rejetés.

"Actuellement environ 95% des bateaux contenant de l’amiante et des PCB sont démantelés par les travailleurs les plus pauvres et les moins protégés au monde" commente Jim Puckett du Basel Action Network. "C’est immoral et cela constitue un affront tant aux droits de l’Homme qu’à l’environnement. Mais les pays comme la Norvège, qui mène l’élaboration de ce projet de Convention, semblent décidés à continuer ce transfert disproportionné de dommages vers les pays les plus pauvres."

La convention, telle qu’elle est formulée actuellement, serait en contradiction avec les principales normes internationales protégeant les droits de l’Homme et l’environnement. Ces normes incluent en particulier les conventions de l’ONU et de l’OIT protégeant le droit à un environnement de travail sûr et sain et le contrôle et même l’interdiction, imposé par la Convention de Bâle, à certains transferts de déchets toxiques.

Le mois dernier, un comité spécial établi par la Cour Suprême indienne a révélé des données alarmantes concernant des cas de contamination à l’amiante et de morts accidentelles affectant aujourd’hui des milliers de travailleurs dans les plus grands chantiers indiens. [1]

"Les conclusions récentes corroborent malheureusement tout ce que nous avons dénoncé depuis des années concernant la situation des opérations de démantèlement dans les chantiers sud-asiatiques" souligne Ingvild Jenssen, coordinatrice de la Plateforme d’ONG sur le démantèlement des bateaux depuis Bruxelles. "Les morts et les maladies, dont témoignent les poumons des victimes et le nombre d’accidents, sont de la responsabilité d’une industrie du transport maritime qui poursuit sans vergogne ses seuls intérêts économiques, et des gouvernements qui la protège."

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