« Je prononce cette déclaration au nom de 34 organisations nicaraguayennes et internationales, dont 12 font partie du Colectivo 46/2, une coalition qui assure le suivi de la coopération du Nicaragua avec le système des droits humains des Nations unies.
Les mots nous manquent pour décrire la souffrance que le peuple nicaraguayen endure depuis la répression des manifestations d’avril 2018, ainsi que la gravité et l’ampleur de la crise des droits humains aux mains du gouvernement du Nicaragua. Plus de 150 000 Nicaraguayen⋅nes sont en exil, représentant la troisième plus grande population à demander l’asile au premier semestre 2022, après les Vénézuélien⋅nes et les Ukrainien⋅nes, d’après le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).
Les élections municipales du 6 novembre 2022 se sont terminées par un contrôle absolu par le parti au pouvoir des 153 municipalités du pays, dans le cadre d’un processus « caractérisé par la répression des voix dissidentes et la restriction injustifiée des droits politiques et des libertés civiles », selon le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH).
Les peuples autochtones de la côte nord des Caraïbes continuent d’être exposés à des attaques généralisées par des colons armés sur leurs territoires, avec 90 attaques documentées depuis 2018, dont 32 meurtres, selon les organisations locales.
Avec l’annulation du statut juridique de plus de 2 500 organisations de la société civile, les Nations unies et la Commission inter-américaine des droits de l’homme (CIDH) ont dénoncé un « modèle clair de répression de l’espace civique » contre les voix dissidentes, notamment les journalistes, les défenseur⋅es des droits humains, les acteur⋅ices de la société civile, les universitaires, les étudiant⋅es et les membres de l’Église catholique. Actuellement, le gouvernement détient près de 235 prisonnier⋅es politiques dans des conditions inhumaines.
Dans ce contexte, le refus exceptionnel du gouvernement de coopérer avec les organismes des Nations unies chargés des droits humains est condamnable. De manière inédite, les deux comités des Nations unies chargés de la lutte contre la torture ont dénoncé le refus de coopérer du gouvernement, tandis que les autorités ont également refusé les examens de quatre autres comités des droits humains des Nations unies au cours de l’année écoulée. Des expert⋅es de l’Onu doté⋅es de cinq mandats de « procédures spéciales » ont émis des demandes répétées de visites du pays, restées sans réponse. L’analyse de la société civile basée sur des informations des Nations unies et du système inter-américain souligne l’absence de mise en œuvre par le gouvernement des 14 recommandations de la résolution 49/3 du Conseil des droits de l’homme.
Pour ces raisons, nous lançons aujourd’hui un appel mondial en faveur d’une résolution sur le Nicaragua qui renouvelle pour une période de deux ans le mandat du Groupe d’experts des droits humains sur le Nicaragua ainsi que le mandat de surveillance du Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH).
Nous appelons tous les gouvernements à soutenir une telle résolution lors de la prochaine session du Conseil des droits de l’homme, et à renforcer leur approche intersectionnelle, en accordant une attention particulière à la situation des peuples autochtones et afro-descendants, des migrant⋅es et des personnes déplacées de force, des personnes détenues pour des raisons politiques et des familles des victimes.
Liberté pour toutes les personnes prisonnières politiques au Nicaragua ! »