Palestine : les États doivent agir pour protéger les droits humains et démanteler l’apartheid d’Israël

Maxime Duriez - FIDH

Ramallah, 28 septembre 2022. En août 2022, les autorités israéliennes ont perquisitionné les bureaux de sept organisations de la société civile palestinienne et ont ordonné leur fermeture, pour tenter de mettre un terme à leur travail de dénonciation et de réduire davantage les Palestinien·nes au silence. En réponse à cette escalade alarmante de la répression contre leurs partenaires palestinien·nes, la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), Amnesty International et Human Rights Watch (HRW) conduisent une délégation dans les Territoires palestiniens occupés (TPO) pour exprimer leur soutien à la société civile palestinienne et lutter contre l’occupation abusive et prolongée, l’annexion, l’impunité et l’apartheid.

Dans la continuité de la dernière série d’hostilités à Gaza, les autorités israéliennes ont amplifié leur offensive contre les défenseur·es des droits humains et les organisations de la société civile palestinienne en Cisjordanie occupée. En août 2022, les forces armées israéliennes ont perquisitionné sept des principales organisations de la société civile palestinienne, dont six avaient été arbitrairement déclarées illégales et qualifiées de « groupes terroristes » en octobre 2021.

Ces perquisitions menées par les autorités israéliennes contre des groupes palestiniens visent à entraver le travail de documentation sur les droits humains et à punir celles et ceux qui critiquent les autorités israéliennes, les violations des droits humains et du droit international, et réclament des comptes, y compris pour l’apartheid et la persécution de millions de Palestinien·nes.. L’apartheid et la persécution sont condamnables en tant que crimes contre l’humanité et relèvent de la compétence de la Cour pénale internationale (CPI). L’enquête ouverte par le procureur de la CPI sur les crimes graves commis en Palestine, offre la possibilité de lutter contre l’impunité d’Israël, qui alimente depuis longtemps les violations répétées des droits humains et crimes relevant du droit international.

Réaction à une attaque sans précédent contre la société civile en Palestine et en Israël

« En cette période de tension mondiale et de dégradation des droits humains à travers le monde, Israël joue depuis longtemps un rôle important. Le gouvernement israélien dirigé par Naftali Bennet et Yair Lapid, n’a aucun problème à durcir la répression contre le peuple palestinien et à supprimer toute tentative d’opposition », déclare la présidente d’honneur de la FIDH, Souhayr Belhassen. Avant d’ajouter : « La FIDH affirme sa solidarité indéfectible pour le droit des Palestinien·nes à l’autodétermination et appelle la communauté internationale à montrer la même fermeté face aux actions d’Israël qui ne peuvent être qualifiées autrement que comme celles d’un État scélérat. »

Alexis Deswaef, vice-président de la FIDH et avocat en droit humains commente également : « Le brouillage des lignes sur tous les aspects de la politique intérieure, l’étiquetage abusif d’"organisation terroriste", et l’utilisation inadéquate de la législation antiterroriste font partie intégrante d’un processus cohérent visant à étouffer la société civile en Palestine et en Israël. »

Shawan Jabarin, directeur général d’Al-Haq et secrétaire général de la FIDH affirme à son tour : « Loin d’offrir des conditions favorables pour la tenue sans encombre des prochaines élections législatives en Israël, ces perquisitions montrent au contraire le peu de cas fait à la démocratie. C’est l’antithèse de la démocratie qui est appliquée sur un peuple opprimé. Le peuple palestinien mérite de vivre dans la liberté et la dignité et pour cela, notre travail visant à demander des comptes à Israël est vital. Malgré les attaques contre nous, nous continuerons à nous acquitter de nos missions pour protéger l’état de droit, les droits humains du peuple palestinien, notamment son droit collectif à l’autodétermination, et le droit au retour des réfugié·es. Nous continuerons à protéger le droit international et les droits humains dans le monde entier.  »

Nathalie Godard, directrice des campagnes d’Amnesty International France, déclare : «  La répression de l’espace civique palestinien fait partie du système d’apartheid. Non seulement les Palestinien·nes se trouvent sous occupation militaire israélienne, menée en violation du droit international humanitaire et des droits humains, mais en plus, les organisations et les défenseur·es des droits humains qui cherchent à aider les personnes dans le besoin sont réprimé·es. Amnesty demande à Israël de révoquer la qualification de "terrorisme" des six organisations et d’annuler les ordonnances militaires de fermeture des bureaux de ces organisations. Le personnel et les directeur·ices de ces organisations doivent être autorisé·es à mener leurs activités de défense des droits humains, d’aide sociale et de recherche sans être harcelé·es. Salah Hammouri doit être immédiatement libéré faute à moins d’être rendu coupable d’un crime internationalement reconnu, et la menace de son expulsion de Jérusalem doit être levée.  »

Sari Bashi, directrice des programmes à Human Rights Watch, affirme : «  Human Rights Watch est honoré de travailler avec nos partenaires palestiniens, qui représentent le meilleur de la société civile à travers le monde : défendre les enfants dans les tribunaux militaires, plaider pour la justice internationale, aider les agriculteur·ices à rester sur leurs terres, et soutenir les femmes dans la gestion de leurs entreprises. Le bénévolat et l’activisme pacifique ne sont pas du terrorisme.  »

Les États doivent imposer des conséquences significatives suite à l’action d’Israël

L’escalade du mois d’août 2022 intervient après les diffamations sans fondement qui ont entravé le financement et la représentation juridique des organisations palestiniennes de défense des droits humains, le piratage des téléphones, d’autres formes de surveillance, des arrestations arbitraires et des interdictions de voyager contre leurs personnels. Mais malgré le harcèlement permanent dont ces organisations font l’objet, elles ont poursuivi leur travail essentiel consistant à fournir une aide humanitaire et des services de protection sociale indispensables aux communautés palestiniennes, à mener des travaux de recherche, à documenter les violations des droits humains en Palestine et à plaider pour que des comptes soient rendus.

Les États doivent appeler le gouvernement israélien à révoquer les désignations de ces groupes palestiniens de défense des droits humains et leur permettre de mener sans entrave leur travail indispensable. Alors que le Conseil d’association Union européenne-Israël, principal organe diplomatique de l’Union européenne chargé de promouvoir les relations intergouvernementales, vient d’être restitué, les gouvernements européens doivent démontrer qu’ils ne seront pas de compromis sur leurs valeurs, placer les droits humains au centre de leur politique à l’égard d’Israël et de la Palestine, et mettre fin à toutes les activités qui contribuent à l’apartheid et à l’aggravation de la répression à l’encontre du peuple palestinien. En somme, tous les États devraient clairement indiquer qu’ils imposeront des conséquences significatives au gouvernement israélien si celui-ci ne change pas de cap.

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